Bienvenue dans les années 1980, quand Spider-Man portait un costume noir rapporté de Battleworld, la planète des Guerres Secrètes. Cette combinaison aux étranges facultés va se révéler de plus en plus mystérieuse et empoisonnante pour le Tisseur, comme ces épisodes le montrent.
Tout le monde sait que le costume est un symbiote qui va fusionner avec Eddie Brock pour devenir Venom, comme on peut le voir dans plusieurs adaptations. Mais il est bon de se replonger dans cette anthologie qui va retracer tout le parcours menant à cette fusion. Le scénario tient la route sans être extraordinaire, et le dessin aussi, malgré une alternance de dessinateurs et d'encreurs assez malheureuse (heureusement, les couleurs ont été retravaillées). Néanmoins, relire cette période où Peter Parker vivait dans un taudis et avait froissé sa tante May (qui avait reconverti sa maison en maison de vieillesse) parce qu'il arrêtait ses études, c'est difficile d'y résister quand on aime le personnage, surtout qu'il s'agit d'une étape importante dans la continuité. Classique, mais vraiment efficace.
Un peu plus tard, une autre période importante pour le Tisseur s'annonce, avec Peter David et Rich Buckler qui débarquent pour chambouler l'univers du héros arachnéen, en quatre épisodes repris dans cet album cartonné qui porte bien son nom. Car oui, ça commence par une mort qu'on ne voit pas et qui va faire monter la tension. Peter Parker est maintenant marié à Mary Jane Watson, et s'il a encore le costume noir, celui-ci n'est plus le symbiote. Le capitaine De Wolff était la meilleure alliée de Spider-Man dans la police, et son trépas des mains d'un certain Rédempteur rend tout le monde nerveux, à commencer par Stan Carter, chargé de l'enquête et allié à Spidey pour la circonstance.
Pas mal de fausses pistes et d'interactions entre les divers intervenants (notamment Daredevil), tellement à cran qu'ils sont confrontés à des choix cornéliens. Les trois épisodes suivants, qui narrent le retour du Rédempteur, ont droit à une atmosphère plus intimiste et aux dessins de Sal Buscema. Alors que les comics super-héroïques "matures" n'existaient pas encore aux yeux des critiques, Peter David se lançait dans ces épisodes d'anthologie en jouant parfaitement avec les personnages, les rendant plus humains et instaurant de vraies réflexions sur la violence, le système judiciaire et la réinsertion des prisonniers. On regrettera à peine de ne pas avoir les épisodes qui séparent les deux histoires. Un très bon classique qui n'a pas beaucoup vieilli.
Après les classiques de chez Panini, on attaque les productions Réflexions/French Eyes. On commence avec le crossover mettant en scène Eric Draven/The Crow et Razor. Sachez que sous cette sympathique couverture en couleurs se cachent des dessins en noir et blanc extrêmement confus et parfois approximatifs, ajoutant d'autant plus de complication à comprendre un récit violent, anecdotique et incompréhensible. Les auteurs ne sont pas vraiment crédités, et Razor pas présentée. Mais encore ? La relecture n'a pas été faite. Résultat, on a une épreuve non corrigée d'un album oubliable. Pas très sérieux. Pour les fans ultimes du héros de James O'Barr uniquement, les autres préféreront se diriger vers les albums du French Crow.
Avec le Capitaine LSD de Jim Dandy, on change carrément de registre - et de format. On a droit à un ancien super-héros alcoolique, accroché à son passé et mélancolique. Bien sûr, il y a des tentatives parodiques et plus humoristiques, mais le récit est plus métaphorique et humain que super-héroïque. On vit pleinement la déchéance du Capitaine LSD et ses poèmes nébuleux, jusqu'à la révélation finale.
Un récit qui ne fait pas dans la facilité, ni dans la joie, mais montre un univers complexe où le héros a laissé place à l'individu. Le scénario est bien mené, et le dessin tient très bien la route (à quelques rares occurrences près). Le lettrage (et la relecture), par contre, aurait pu être meilleur. Pas à mettre entre toutes les mains, pour sûr, mais les amateurs de déconstruction seront séduits.
Et là, on change presque d'éditeur, mais aussi d'univers. French Eyes nous propose donc les aventures en BD du Doctor Who dans sa dixième incarnation, avec sa compagne d'alors Martha Jones.
Là encore, on sent que la relecture est passée à la trappe. Pour ce qui est de la traduction, je n'ai pas senti de manques, mais je connais mal les traductions françaises appropriées à cet univers. Et surtout, le choc visuel : au moins quatre dessinateurs différents et aux styles peu homogènes pour ces 144 pages ! Il faut donc s'accrocher pour suivre ce récit complet et à tiroirs. Un scénario dans la droite lignée de la série, adapté au format comics, qui n'est toutefois pas dans le haut du panier. Et puis c'est Martha Jones, pas le personnage le plus intéressant, mais il semble que le scénariste ait des plans sur le long terme. Je demande à voir. En tout cas, les amateurs du Docteur (et de Martha) auront leur compte, en espérant que la suite sera plus intéressante.
Je sais, on ne doit plus dire "French Comics", mais bon... J'ai enfin pu découvrir l'un des super-héros français de ces dernières années, le mythique Shaango, dont les trois épisodes sont repris dans cet album avec des histoires courtes en supplément. C'est donc copieux pour ce premier chapitre.
Ishan, jeune éducateur en banlieue, se découvre une nuit des pouvoirs électriques alors qu'il se fait battre par la police pendant un contrôle d'identité. Il devra apprendre à en faire usage, et à gérer ça avec sa vie et son quartier, tout en essayant de comprendre ce que ses racines africaines - dont il ignore tout - font là-dedans.
Bon, on a de grosses ficelles sur la banlieue et la politique post-11 septembre façon Bush et Sarkozy, mais l'histoire fait quand même appel à l'humanité des personnages et à la mythologie africaine, évitant pas mal d'écueils liés au super-héroïsme classique. Ishan tue, fait des erreurs, a des obsessions, etc. Pour autant, malgré une bonne tenue, le scénario n'est pas si original que ça passé son cadre, et les dessins souffrent de staticité photoshopesque sur beaucoup de planches et de proportions trop souvent maladroites. Les scènes d'action, en revanche, sont très réussies. Les auteurs s'approprient les codes du super-héros pour les transposer en France, et ça fonctionne plutôt bien, car le récit est bien mené et distille suffisamment de mystère pour tenir en haleine. Une bonne petite surprise.
En revanche, l'attendu Pantz d'Alexandre Foret et Frédéric Mur me laisse sur ma faim. D'accord, c'est un prologue, mais un prologue à quoi ? On passe d'une époque à l'autre sans transition et en se demandant quels sont les liens, sans indication sur l'histoire qui suivra. Ce comic-book aurait largement mérité un peu plus de pages pour développer son propos. Même si le dessin de Frédéric Mur a encore quelques petites lacunes au niveau des proportions (les personnages font vraiment jeunes, notamment), les décors sont soignés, mais voilà, on sort quand même de cette lecture comme de celle de beaucoup de comics actuels : avec l'impression qu'on a eu une histoire découpée.
Avec Strangers, par contre, on a droit à du plus classique et à des histoires plus ou moins auto-contenues. Jean-Marc Lofficier a une écriture plus proche du Silver Age, et aime à multiplier les personnages sans oublier de les mettre sous le projecteur : même si l'épisode contre Hunter est de la baston classique, les quelques révélations distillées çà et là arrivent à ne pas endormir l'intérêt. Mais le suivant en montre bien plus sur Futura et ses ennemis, dans une ambiance plus horrifique. Une bonne série.
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